Jean MARIDOR - 2 - Témoignages et documents communiqués par la famille Maridor

Jeunesse de Jean Maridor avant la guerre

Tout jeune Jean a été attiré par les avions, il passait son temps libre au terrain de Bléville, qui avait été inauguré dans les années 1928.

Une page de l'album de famille
Une page de l'album de famille
Terrain de Bléville 1939, 1er et 2e degrés
Terrain de Bléville 1939, 1er et 2e degrés
Faisant le pitre...
Faisant le pitre...
1939, devant le Phalène, moteur hispano
1939, devant le Phalène, moteur hispano
En Angleterre, les pilotes amis de Jean
En Angleterre, les pilotes amis de Jean
Jean Maridor en grande tenue d'aviateur
Jean Maridor en grande tenue d'aviateur
Image distribuée aux enfants de l'école Jean Maridor du Havre lors des commémotions de l'aviateur dans les années 1950 (coll. part.)
Image distribuée aux enfants de l'école Jean Maridor du Havre lors des commémotions de l'aviateur dans les années 1950 (coll. part.)

Texte lu à la B.B.C par Jean MARIDOR en avril 1942

alors qu’il était au 91 Squadron, R.A.F. Station,

Hawkinge en Grande Bretagne

 

Introduction par le speaker de la BBC :

Détruire des bateaux avec un canon depuis un Spitfire est tout à fait réjouissant, mais quelque peu dangereux. Cependant des pilotes français de la France Libre ont mené des centaines d’attaques contre des navires allemands. Ils pensent que chaque bâtiment qu’ils coulent est un pas menant directement à la libération de leur pays. Voici un jeune pilote combattant de la France Libre de 21 ans, Jean Maridor, qui va vous raconter deux attaques réussies récemment et sur le cauchemar de son retour au sol.

 

Maridor :

Beaucoup de pilotes de la France Libre ont plus d’expérience de l’attaque des bateaux que moi. L’un d’eux a à son actif 35 attaques contre des navires allemands, et je pense que nous devons tous admettre que c’est là une des façons la plus satisfaisante de combattre les boches.

Il y a peu, j’étais au dessus de la Manche, avant que beaucoup d’entre vous aient encore bu leur café du matin. Je volais avec mon Spitfire en rase-mottes, quand je vis un poseur de mines allemand. Je grimpais à environ 200 pieds et interrompis le petit déjeuner de l’équipage en lui envoyant une bonne giclée de mon canon et de ma mitrailleuse. De la fumée noire et de la vapeur sortirent du bateau qui a sans doute pris feu, et je m’en retournais à la maison, non sans voir l’équipage mettre à l’eau une embarcation, abandonnant sans doute le navire.

Il y a quelques jours j’ai attaqué une cible d’un méchant coup d’aiguillon. C’étaient deux R boats [Räumboote, dragueurs de mines], utilisés pour la Flak [DCA], protégeant Nieuport [port en Belgique sur l’estuaire de l’Yser]. Je grimpais à environ 1 000 pieds et piquais pour attaquer l’un d’eux au canon et à la mitrailleuse. Je le touchais mais n’eus pas le temps de voir s’il coulait car l’autre me toucha juste au moment où je sortais du piqué. Le R boat se présentait devant moi et au moment où je tirais le manche je sentis un terrible choc dans l’avion. Un obus m’avait touché juste derrière le cockpit, mettant le feu à l’avion et sectionnant le gouvernail. Heureusement j’avais réussi à grimper jusqu’à 3 000 pieds mais j’avais 50 miles au dessus de l’eau à retraverser vers l’Angleterre, avec seulement les ailerons pour gouverner.

Je peux vous dire que ce n’était pas très drôle. Pendant un moment je me suis senti plutôt seul et impuissant. Mes pieds appuyaient sur un palonnier devenu inutile et mes mains tenait un manche qui agissait seulement sur les ailerons. Autour de moi je voyais des bouffées noires d’obus explosifs et je ne comprenais pas pourquoi je n’étais pas à nouveau touché. Je jetais la verrière, prêt à m’éjecter, mais je découvris qu’en ouvrant la manette des gaz quand mon Spitfire plongeait et en la fermant quand il grimpait, je pouvais encore voler. Avec mes ailerons pour aider, je volais vers la côte anglaise, et trois fois je pensais qu’il faudrait que je m’éjecte dans la mer. Trois fois je réussis à garder le contrôle, mais mon Spitfire montait et descendait, montait et descendait comme dans un manège de montagnes russes géant. Il me sembla que des heures entières s’écoulèrent avant de revoir la côte et Canterburry. Je savais que je ne pourrais pas atterrir dans ces conditions et je cherchais un endroit pour m’éjecter, et que le Spitfire ne cause aucun dommage en s’écrasant. J’en trouvais un, mais mon Spitfire ne voulut pas m’aider, il commença à grimper jusqu’à 3 000 pieds et replongea. J’essayais mes trucs avec les gaz, mais il ne voulut pas remonter. Je décidais de m’éjecter, mais pendant un moment la pression de l’air me plaqua dans le cockpit, c’était difficile d’en sortir. Enfin le vent me balaya hors de la machine et je commençais à tomber, ma tête heurtant la queue de l’avion. Je tombais à toute vitesse, en comptant jusqu’à six avant d’actionner la poignée du parachute. Si je l’avais fait tout de suite je me serais peut être cassé le cou. J’étais à environ 500 pieds au dessus du sol quand mon parachute s’ouvrit et après avoir flotté quelques secondes je tombais dans les branches d’un arbre et dans les fil du téléphone, mais intact. Mon parachute pendait dans les branches et je vis de la fumée noire et des flammes comme mon avion s’écrasait à quelques dizaines de mètres de là où j’étais. Je l’ai échappé belle et après avoir pris le thé avec des officiers de l’Armée, ils me conduisirent à la base, ce qui était gentil de leur part.

Je dois vous parler du feu dans mon avion. Heureusement il s’est éteint au bout de cinq minutes, mais je dois vous dire que cela m’aurait embêté si je n’avais su qu’il n’y avait rien à brûler derrière le cockpit.

Ce n’est pas la première fois que j’ai été touché par la flak allemande. Je revins un jour de Dunkerque avec presque un aileron en moins. L’explosion d’un obus me mit sur le dos et je volais au retour les deux mains sur le manche. Un autre jour un projectile fit éclater un de mes pneus et je me retrouvais sur le nez en atterrissant.

Toutes ces expériences montrent que le Spitfire peut beaucoup encaisser, et je peux vous dire que je me suis amusé C’est la seule façon. Nous devons attaquer, attaquer et encore attaquer.

La maquette du Spitfire de Jean chez sa soeur Thérèse
La maquette du Spitfire de Jean chez sa soeur Thérèse
Au centre: Jean Maridor, le général Vallin et le général de Gaulle
Au centre: Jean Maridor, le général Vallin et le général de Gaulle
Victoires remportées par Jean Maridor entre le 14 octobre 1941 et le 3 août 1944, jour de son sacrifice
Victoires remportées par Jean Maridor entre le 14 octobre 1941 et le 3 août 1944, jour de son sacrifice

Pour en connaître davantage sur Jean Maridor consulter le site de Jean-Claude AUGST:

http://www.jean-maridor.org