TOURNERET Jean Paul (1921-1942) FAFL         SAS Parachutistes                                              1ère Compagnie de l'Air                                      Mort pour la France

Mis à jour le 27/05/2020

 

Biographie établie et communiquée par Frédéric Bentley, (Association AMFAFL) avec tous nos remerciements

En 1940,Jean-Paul habite Le Havre où il pratique le scoutisme. Il est alors âgé de 19 ans et prépare le concours d’entrée à l’Ecole militaire de Saint-Cyr.

 

Dès les 1ers bombardements de la ville du Havre par l’aviation allemande, dans la nuit du 19 au 20 mai 1940 Jean-Paul prête main-forte comme secouriste à la Croix-Rouge ; sa mère est membre du Comité de la ville. 48 incendies sont déclarés en différents points de la ville et du port.

Au début du mois de juin à l’approche des troupes allemandes, la famille TOURNERET décide de quitter la ville pour échapper à l’envahisseur.

 

Portait de Jean-Paul au Havre en 1940

Dès les 1ers bombardements de la ville du Havre par l’aviation allemande, dans la nuit du 19 au 20 mai 1940 Jean-Paul prête main-forte comme secouriste à la Croix-Rouge ; sa mère est membre du Comité de la ville. 48 incendies sont déclarés en différents points de la ville et du port.

Au début du mois de juin à l’approche des troupes allemandes, la famille TOURNERET décide de quitter la ville pour échapper à l’envahisseur.

 

L'EVASION

Jean-Paul ne supporte pas l’occupation de la France par l’armée allemande. Par soif de liberté, il désire rejoindre l’Angleterre pour aller se battre pour la France. Avec son calme habituel, il prépare silencieusement son départ.

Une matinée de juillet, il prévient sa mère qu’il part faire une petite promenade à bicyclette. Ne le voyant pas revenir, sa mère pénètre dans sa chambre et découvre ce petit mot : « Ma petite maman chérie, je pars pour l’Angleterre. J’aurais préféré l’Armée française mais je n’ai pas le choix. Il ne m’est pas possible de rester sans rien faire quand la France lutte encore. »

Quelques jours plus tard, elle reçoit un mot de Jean-Paul, qui lui dit être en Bretagne, qu’il a planté sa tente de scout sur la plage et cherche une occasion d’embarquer.

Finalement il réussit à trouver une petite embarcation qui l’emmène jusqu’en Angleterre, après cinq longs jours passés en mer et bien des difficultés à pour traverser la Manche (The Channel).

 

L'ENGAGEMENT

Le 24 août 1940, Jean-Paul TOURNERET, alors âgé de 19 ans, se présente à Londres à « l’Empire Hall », communément appelé « Olympia », que le gouvernement britannique a mis à disposition du Général de GAULLE pour y installer un Centre d’accueil des volontaires désireux de s’engager dans la France-Libre. Jean-Paul y signe son acte d’engagement n° 00442D.

Aout 1940 – Jean-Paul, arrivé à Londres, fait la rencontre du Général de GAULLE, l’homme de l’appel du 18 juin. Il rencontre également l’Amiral MUSELIER commandant les Forces Navales et les Forces Aériennes Françaises Libres. Il a l’occasion également de partager un repas avec le Capitaine PASSY, de son vrai nom André DEWAVRIN, responsable du 2e Bureau de l’Etat-Major des Forces Françaises Libres.

Jean-Paul est dirigé vers le camp de « Delville Camp » près d’Aldershot et de Farnborough, à 70 kms au sud-ouest de Londres. A son arrivée il découvre deux camps qui se font face, de part et d’autre d’une grande aire de parade : « Delville Camp » et « Morval Camp ». 2 noms choisis en hommage à deux sites de la Bataille de la Somme en France. Chacun des camps a son lot de baraques en bois parfaitement alignées servant de dortoirs, de réfectoires, de douches, de salles de formation. Le plus étonnant sont les WC : 12 sièges faisant face à 12 autres sans aucune cloison.

Le 20 septembre 1940, Jean-Paul signe, devant le Capitaine REDEL, son acte d’engagement définitif n°00973A. Débute alors une période de formation à l’instruction militaire élémentaire avec les chasseurs alpins de la Compagnie du Capitaine LALANDE. Aux vues de ses capacités et de ses aptitudes, Jean-Paul TOURNERET est sélectionné pour suivre le peloton d’Élève-officier.

 

VOLONTAIRE POUR LES PARACHUTISTES

Au cours de l’hiver, il apprend qu’un certain Capitaine BERGÉ cherche des volontaires pour former une Compagnie de parachutistes. Jean-Paul, en soif d’action, voit là une opportunité de pouvoir rejoindre plus rapidement les zones de combat. Il décide de s’engager dans les parachutistes.

Le Capitaine BERGÉ va imposer à ses hommes un entraînement physique des plus rigoureux. Ils suivent une formation les préparant à leurs futurs combats, dans différents centres, dont celui de Wothan dans le Comté du Kent, puis à celui des français au Camp de Camberley à son ouverture en janvier 1941. Les entrainements sont d’une extrême dureté, marches organisées par tous les temps, de jour comme de nuit, entrecoupées d’exercices variés, attaque d’une ferme, d’un pont, pose de charges explosives, tout cela sans se faire attraper par les Home-Guards. Celui qui se faisant prendre, n’ayant aucune pièce d’identité sur lui, risquait d’être pris pour un parachutiste allemand et subir arrestation et interrogatoire musclé des services de sécurité. Les hommes apprennent à se battre, à tuer, l’art du sabotage, tirs avec tout type d’armes dans toutes les positions.

 

FORMATION de PARACHUTISTE à RINGWAY

Le 4 avril 1941, Jean-Paul TOURNERET est affecté à la 1ère C.I.A (Compagnie d’Infanterie de l’Air) de la France-Libre, et dirigé vers le Centre de formation des parachutistes de RINGWAY (situé près de Manchester, au nord-ouest de l’Angleterre).

Sur cette Base Aérienne de la R.A.F a été créée en 1940 la 1ère École d’entrainement parachutiste (n°1 Parachute Training School). Ecole de formation incontournable pour obtenir son brevet de parachutiste. Les français du « First Para Bataillon » ne passent pas inaperçus avec leur tenues kaki, coiffés du calot bleu-marine de l’Armée de l’Air française, et cousu à l’épaule le badge « France ». Ce centre de formation est réputé pour sa dureté et son extrême rigueur. Le stage d’entrainement va durer 4 semaines. Les hommes en sortent fièrement avec leur brevet de parachutiste.

Le 10 avril 1941 Jean-Paul effectue son premier saut en parachute à RINGWAY.

Le 25 avril 1941, devant Winston CHURCHILL, venu saluer les volontaires français, Jean-Paul participe à un exercice d’entrainement par équipe. Les français sont en compétition avec les autres équipes anglaises. Le saut se fait par 8, avec containers et parcours d’exercices au sol. Résultat, les français arrivent les 1ers en armes, et les 1ers au but !

Le 27/04/1941, Jean-Paul, qui a poursuivi ses activités de scoutisme, est nommé membre du « Conseil Fédéral Scout ». Dès son arrivée en Angleterre Jean-Paul s’était rapproché de Mr RENOULT « le Chef français » pour les scouts en Angleterre. Monsieur RENOULT réside à Londres 142 St Georges Street, Hanover Square.

Le 30/04/1941, Jean-Paul TOURNERET obtient son Breveté parachutiste n°471.

 

FORMATION à INCHMERY-HOUSE

Le 15/05/1941, après l'entraînement de saut en parachute, la 1ère C.I.A quitte Ringway pour s'installer à Exbury, au camp d'entraînement de « Inchmery-House » dans une propriété appartenant à la famille Rothschild. Elle est située en bord de mer, face à l'île de Wight, tout près du port de Southampton, dans le sud de l’Angleterre.

La compagnie est alors renommée 1ère C.P (Compagnie Parachutiste) et comprend alors 10 officiers, 12 sous-officiers et 74 hommes. Là, les parachutistes reçoivent une formation de commando très poussée et physiquement très dure.

Deux groupes distincts sont constitués.

- Le premier groupe reçoit une préparation au combat et à l'exécution de coups de main.

- Le second groupe est destiné à la lutte clandestine et au renseignement.

Juillet 1941 - Le Général de GAULLE tient particulièrement, malgré son petit nombre, à ce que la France Libre soit présente partout et participe aux combats du Proche-Orient. Il souhaite ainsi faire la preuve que la France Libre occupe un rôle actif dans la conduite de la guerre et également s'assurer que les territoires français libérés ne seront pas alors dirigés par les Britanniques. Dans ce but, il réclame que la 1ère Compagnie de Parachutistes soit envoyée au Levant (Syrie & Liban). A cette date, la Syrie et le Liban viennent d'être libérés par les Alliés avec l’intervention de la 1ère Brigade des Forces Françaises Libres commandée par le Général MONCLAR.

Le Capitaine BERGÉ laisse à « Inchmery » le groupe spécialisé dans les missions de renseignements, et se prépare, avec le reste de la Compagnie, pour un départ au Moyen-Orient.... Jean-Paul TOURNERET sera du voyage....

JUILLET 1941 AU CAMP DE TRANSIT DE BARNES

Le 16/07/1941 - mercredi 16 juillet 1941 le reste de l'unité rejoint Londres et s'installe quelques jours au camp de transit de Barnes. Sur la photo  de groupe légendée au camp de Barnes, Jean Paul Tourneret est le 4e de gauche à droite au rang du milieu.

 

Françaislibres.net

 

 DÉPART POUR l’EGYPTE

Le 21 juillet 1941, une cinquantaine d’hommes de troupe, 2 officiers, 3 sous-officiers, 1 médecin militaire, embarquement sur le paquebot « SS Cameronia » au port de Greenock près de Glasgow (Écosse) à destination du Moyen-Orient. (photo 3)

Le 03/08/1942, le « SS Cameronia » intègre le convoi WS-10 en formation et prend la mer. Le convoi WS-10 comporte 16 navires de transport de passagers, et 3 cargos de transport de matières explosives, le navire commandant étant le « SS Orcades ».

Après quelques jours de navigation le navire passe au large des Iles des Açores et des îles du Cap-Vert, poursuivant sa route vers le sud.

Le 17/08/1941, il fait escale dans la baie de Freetown en Sierra-Leone pour ravitaillement.

Le 02/09/1941, escale au port de Cape-Town en Afrique du Sud.

Le 05/09//1941, escale au port de Durban en Afrique du Sud. La Compagnie de parachutistes débarque.

Le 08/09/1941, la Compagnie de parachutistes réembarque sur un autre navire le SS Nieuw-Amsterdam, qui prend la mer à 13h00-GMT avec le navire SS Mauretania formant le convoi CM18 escorté par le croiseur HMAS Australia à destination d’Aden et Suez.

Le 18/09/1941, arrivée à Port-Toufik près de Suez en Egypte.

 

ARRIVÉE AU MOYEN-ORIENT

Transfert par voie routière de Port-Toufik à El-Kantara (Égypte) en camions, puis par voie ferroviaire à Beyrouth (Liban), en traversant la Palestine.

Le 23/09/1941, arrivée à Beyrouth et réception par le Général de LARMINAT, commandant les FFL au Levant. La compagnie passe sous contrôle de l’Armée de Terre et prend le nom de « Peloton de Parachutistes du Levant ».

Le 30/09/1941, après un court séjour à Beyrouth, le groupe du Capitaine BERGE rejoint le camp d’aviation de Mezzé près de Damas en Syrie et passe sous les ordres du Général MONCLAR.

Les parachutistes sont enregistrés à la Compagnie de l’Air à Rayack. Le Capitaine BERGÉ dès son arrivée découvre le manque cruel de moyens : pas de parachutes, ni d’avions adaptés aux parachutistes. Il tente malgré tout, au cours des premières semaines, de maintenir le moral de ses hommes en organisant divers exercices d’entrainements.

Le 15 octobre 1941, par décision du Général de GAULLE, la Compagnie est rebaptisée « 1ère Compagnie de Chasseurs Parachutistes » (1ère CCP).

(+) Le 22/10/1941, trois parachutistes, Jacques LINALE 19 ans, Pierre PROVOT 21 ans, Gaston KLINKEMAILLÉ 19 ans, meurent accidentellement lors d’un vol d’entrainements à bord du Bristol-Blenheim IV T1855 du Groupe Lorraine piloté par le Sous-lieutenant Daniel NEUMANN (25 ans), qui s’écrase non loin du terrain d’aviation à 3kms au nord-est de Daraya.

Le 26 novembre 1941, revue devant le Général CATROUX. La 1ère CCP (Compagnie de Chasseurs Parachutistes) passe sous le commandement des FAFL en Moyen-Orient (Force Aériennes Françaises Libres) sous les ordres du Général Martial VALIN.

(+) Le 24/12/1941, le jeune parachutiste Hilaire GAULTIER 20 ans, meurt accidentellement en voulant dévisser la fusée d’un obus qui explose.

 

CHEZ LES SAS au CAMP de EL-KABRIT

La 1ère CCP ne pouvant réellement être opérationnelle par manque de moyen, il est décidé qu’elle puisse intégrer la Brigade des commandos britanniques du Major David STIRLING (photos 5 6 7). Cet homme, à force de ténacité, a réussi, malgré le scepticisme de son Etat-Major, à créer cette unité en juillet 1941. Cette unité du SAS (Spécial Air Service) est nommée « Détachement L », elle comprend une soixantaine d'hommes réputés pour avoir des méthodes peu orthodoxes. Le Major David STIRLING veut en faire une unité SAS capable de faire des raids en profondeur derrière les lignes ennemies, de s'attaquer aux quartiers généraux, aux aérodromes, aux dépôts de munitions et d'approvisionnement ainsi qu'aux moyens de communication de l'ennemi. « Who dares wins » (Qui ose vaincra) en sera la devise (photo 4).

Ses hommes subissent un entraînement intensif à la marche et à l’orientation dans le désert. STIRLING attend de ses hommes bien plus que le meilleur, de jour comme de nuit. Un entrainement particulier est mis en place pour le maniement de tous les types d’armes qu’il peut exister. Ils s’emploient également à la fabrication innovante de bombes incendiaires à retardement, qu’ils ont spécialement mise au point, baptisées « Lewes » (mélange de plastic de thermite et d’huile minérale) du nom de son concepteur, Jock LEWES, l’adjoint du Major STIRLING.

En décembre 41, ils ont pu mener avec succès plusieurs raids en pénétrant les lignes ennemies, attaquant par surprise les aérodromes et détruisant plusieurs dizaines d’avion en stationnement en allant déposer discrètement leurs bombes incendiaires à retardement sous les ailes.

Le 02/01/1942, La 1ère Compagnie de Chasseurs Parachutistes du Capitaine BERGÉ quitte Damas pour l'Egypte. Les parachutistes atteignent le Camp de Kabrit proche du Grand Lac Amer, situé à 100 kms à l’Est du Caire, sur les bords du canal de Suez. A son arrivée, le « French Squadron » ainsi nommé, installe son campement, et la trentaine d'hommes débute un entraînement très dur. A ces Français, la compagnie intègre également un sergent tunisien et quatre volontaires syriens. Débute alors le dur entrainement exigé par le Major STIRLING, et en particulier « l’art du sabotage » que va leur enseigner le Captain Bill CRUMPER.

Le Capitaine BERGÉ demande à Jean-Paul TOURNERET de se former tout particulièrement à l’usage de ses explosifs.

Le 16/01/1942, Jean-Paul obtient la note de 20/20 à l’issu d’une série d’exercices de destruction. Il est ensuite désigné pour pratiquer des cours de destruction à des officiers, auxquels il prend beaucoup de plaisir.

Le 11/02/1942, Jean-Paul TOURNERET est nommé Caporal avec la mention : « Peut et doit être officier ».

Le 21/02/1942, la période de formation des paras du « French Squadron » se termine.

 

UN PREMIER EXERCICE DE SABOTAGE

Pour prouver leurs capacités, ils s’adonnent à un exercice de sabotage en effectuant un raid sur l’aérodrome de Héliopolis distant de 130 kms. Vingt-quatre hommes sont désignés et forment deux groupes placés sous le commandement du Capitaine BERGE et du Lieutenant JORDAN. Le raid débute par « une marche vers le Caire » à travers le désert de Kabrit. Au bout du troisième jour, les 2 groupes atteignent le point prévu pour l’approche finale à quinze kilomètres de l’objectif. La nuit suivante, les groupes de sabotage pénètrent, sans être découverts, sur la Base aérienne de Héliopolis sévèrement gardée. Pour simuler le sabotage des avions, ils doivent apposer des étiquettes adhésives sur les avions disséminés sur le terrain.

L’opération est une réussite ! Sans avoir été repérés, ils ont marqué 90 avions et 2 dépôts d’essence. La preuve est faite, le « French Squadron » est opérationnel.

Quelques jours de permission passés dans un endroit merveilleux au bord du NIL dans la propriété de Mr VENDÉ directeur d’une sucrerie française.

Le 22/05/1942, le « French Squadron » est réparti en deux compagnies. L’une est commandée par le Lieutenant André JOURDAN, avec pour adjoint Jean-Paul TOURNERET.

Le 01/06/1942, visite du Général Martial VALIN commandant les FAFL. Jean-Paul TOURNERET est proposé au grade d’Aspirant...

OPERATION COMMANDO A MATURBA-DERNA du 7 au 13 juillet 1942 (Libye)

 

Le 02/06/1942, visite du Duc de Gloucester. Dans l’après-midi, préparations au départ pour la prochaine mission. Le Major STIRLING vient d’être sollicité pour apporter sa contribution à une importante opération qui consiste à venir en aide à la garnison britannique présente sur l’ile de Malte. En effet le maintien des britanniques sur l’Ile de Malte est très préoccupant. L’ile subit un blocus maritime depuis plusieurs mois, et des attaques quotidiennes de l’aviation ennemie. Une opération de grande envergure, pour en assurer le ravitaillement, est en préparation pour y conduire un important convoi maritime au départ d’Alexandrie. La RAF devra à la fois assurer la protection aérienne du convoi, et dans la mesure du possible occuper l’aviation ennemie dans d’autres lieux. Mais les moyens, dont dispose la RAF, sont limités en raison de son engagement sur le front libyen en soutien des troupes au sol qui mènent bataille face à l’Armée de l’Afrikakorps du Maréchal ROMMEL.

Dans ce contexte, le Major David STIRLING propose à son Etat-Major d’intervenir avec ses hommes pour mener une opération commando en s’introduisant directement dans les aérodromes, où est installée l’aviation allemande, pour détruire un maximum de leurs avions. L’opération commando est accordée à STIRLING, elle concerne une série d’aérodromes libyens autour de Benghazi à plus de 150 kms à l’arrière de la ligne de front, ainsi que l’aérodrome d’Héraklion situé sur l’Ile de Crête.

 

Ainsi 8 groupes de para-commandos sont constitués : 2 britanniques et 6 français

- Le groupe du Commandant BERGÉ, avec 4 hommes, sera débarqué sur l’Ile de Crête, désormais aux mains des allemands, pour aller détruire des avions présents sur l’aérodrome.

- Le groupe du Lieutenant JORDAN, le groupe du Caporal de BOURMONT, et le groupe du Caporal TOURNERET, chacun accompagné de 4 hommes, devront atteindre trois aérodromes du secteur Maturba – Derna.

- Le groupe du Sous-lieutenant JACQUIER, et ses 4 hommes, devra atteindre l’aérodrome de Barcé.

- Le groupe de l’aspirant ZIRNHELD, et ses 4 hommes, devra atteindre l’aérodrome de Berka III, près de Benghazi.

- Le groupe du Capitaine MAYNE, et ses 4 hommes, devra atteindre l’aérodrome de Berka I.

- Le groupe du Major STIRLING, et ses 4 hommes, devra atteindre l’aérodrome de Bénina.

Le groupe du Commandant BERGÉ embarquera le 8 juin à bord d’un sous-marin pour atteindre l’ile de Crête. Il entrera en action dans la nuit du 11 au 12 juin.

 

DÉPART EN MISSION

Le 07/06/1942, les 7 autres groupes, dont celui de Jean-Paul TOURNERET, sont transportés par avion du terrain de Kabrit jusqu’au terrain de l’oasis égyptienne de Siwa situé à 1150kms au nord-ouest du pays, proche de la frontière libyenne. Les avions décollent à 07h00 avec hommes, vivres, eau, munitions et explosifs, pour atterrir vers midi. Ils sont accueillis comme prévu par leurs amis du L.R.D.G (Long Range Desert Group) que l’on surnomme également « les rats du désert », des spécialistes dans la reconnaissance à très longue distance derrière les lignes ennemies, et les opérations commandos (photographie 2).

C’est le Capitaine néo-zélandais GUILD du L.R.D.G qui va accompagner les groupes de JORDAN, TOURNERET, et de BOURMONT. L’après-midi est occupée à préparer les véhicules. STIRLING distribue au chef de groupe les photos récentes des sites à atteindre. Le plan prévoit que les groupes seront transportés et déposés au plus près des aérodromes. Pour cela ils disposent chacun d’un camion bâché aux couleurs de l’Afrikakorps et d’hommes d’origines allemandes, farouches opposants de Hitler, qui serviront de chauffeur et accompagnateurs, les commandos français seront camouflés à l’arrière des camions.

Le 08/06/1942, c’est le départ pour parcourir les 1000 kms à vol d’oiseau qui les séparent de l’endroit à atteindre à travers le désert libyen. A cette époque de l’année la température dépasse les 40°C … à l’ombre.

Le 10/06/1942, dans l’après-midi le convoi arrive à l’endroit prévu, environ à mi-chemin entre Benghazi et Tobrouk à l’intérieur des lignes allemandes.

Le 12/06/1942, départ à l’aube vers les aérodromes. Les premiers barrages de contrôles sont franchis avec succès, leurs équipages allemands jouant pleinement leurs rôles.

14h00 - Ils ne sont plus qu’à une quarantaine de kilomètres des aérodromes de Derma et Maturba. Un seul camion part en reconnaissance pour repérer les lieux au plus près des aérodromes, à son bord Jean-Paul, Pierre de BOURMONT son ami, Michel VIDAL, Jean ROYER et le Lieutenant JORDAN. Des trous dans la bâche du camion permettent aux commandos d’observer la situation. A Derna-ouest ils vont même aller jusqu’à traverser le terrain d’aviation et observer au plus près 2 escadrilles d’avions de chasse Messerschmitt Me-110. Ensuite à l’approche du terrain de Siret-El-Cheira, c’est à la jumelle qu’ils observent une dizaine de chasseurs-bombardier Stukas.

17h30 - Leur ballade terminée, ils sont de retour. Le Lieutenant JORDAN répartit les objectifs à atteindre à chaque chef de groupe.

20h45 – C’est l’heure du départ pour chaque camion. Le groupe de TOURNERET doit s’occuper de l’aérodrome de « Maturba 3 ». Le camion les dépose à 3kms au nord de l’objectif. L’attaque doit être lancée comme convenu à minuit. Jean-Paul TOURNERET, les deux frères ROYER, Émile LOGEAIS et Lucien GEIZER atteignent les abords de l’aérodrome.

23h00 - Voilà que l’aérodrome se retrouve en pleine alerte … fusées éclairantes, projecteurs, patrouilles multiples. Finalement Jean-Paul décide de stopper la mission et rebrousse chemin au point de rendez-vous prévu. Ils finissent par l’atteindre à l’aube après avoir marché toute la nuit.

Ils sont rejoints par son ami Pierre de BOURMONT et Marcel DREZEN, pour eux aussi les choses ont mal tourné, trahis par un des chauffeurs qui s’est avéré être un espion allemand. L’alerte donnée à 23h00 explique l’effervescence provoquée au terrain de « Maturba 3 » où devait intervenir le groupe de Jean-Paul. Au lever du soleil, dépourvus d’eau et de nourriture, les 7 commandos décident de rejoindre les montagnes les plus proches. A la sortie de la cuvette dans laquelle ils se trouvent le groupe de paras est pris à partie par une patrouille allemande. Débute alors un violent combat à la mitrailleuse et la grenade. Marcel DREZEN est sérieusement blessé à la jambe. Au bout de 15 min, alors qu’ils sont entourés d’une soixantaine d’allemands, ils finissent par admettre que le mieux est de rompre le combat, plutôt que de perdre la vie dans ces conditions.

L’opération ne fut pas un échec pour autant : le groupe ZIRNHELD atteint son objectif sur l’aérodrome de « Berka III » ; le groupe STIRLING celui de « Benina » ; le groupe MAYNE celui de « Berka I » ; le groupe JACQUIER, a défaut de pouvoir saboter les avions sur l’aérodrome de « Barcé », a fait exploser le dépôt de bombes. Les commandos intervenus en Lybie ont retrouvé les camions au point de rendez-vous et seront de retour à l’oasis de Siwa pour le 20 aout. Le groupe BERGÉ a atteint son objectif en Crête sur l’aérodrome d’«Héraklion », 21 avions sur 60 sont détruits ; avant de pouvoir s’échapper George BERGÉ, Jack SIBARD, et Jacques MOUHOT sont faits prisonniers ; le jeune Pierre LÉOSTIC, 17 ans, est mortellement blessé lors d’un assaut.)

 

JEAN-PAUL TOURNERET FAIT PRISONNIER

Faits prisonniers le 13 juin, les allemands les remettent aux mains des italiens. Le lendemain, ils sont conduits par camion vers un camp de prisonniers installé dans un oasis à 10kms de Benghazi. Ils sont regroupés avec des éléments de l’armée britannique (Australiens, Néo-Zélandais, Chypriotes, Hindous).

Après cette opération de sabotage, ce sont quatorze des parachutistes français qui se retrouvent prisonniers: Jean-Paul TOURNERET, Georges ROYER et son frère Jean, Emile LOGEAIS, Lucien GEIGER, Pierre de BOURMONT, Marcel DREZEN, Michel VIDAL, Henri JAMES, Aimé GILLET, Isidore JOUANNY, Louis LE GOFF, Joseph PRADOS, Robert GUICHAOUA. Au vu de leurs blessures Marcel DREZEN et Louis LEGOFF sont rapatriés vers l’Egypte pour être soignés par les anglais.

Avec eux, il y a des rescapés Français-Libres de la Bataille de Bir-Hakeim. On estime le nombre des français à 683. Séparés des prisonniers britanniques, ils reçoivent un traitement déplorable, victimes de brimades. La privation d’eau durant 4 jours fait 22 morts parmi les blessés.

Jean-Paul TOURNERET résiste plus tôt bien dans ces conditions, et quand il le peut remonte le moral de ses camarades. Les prisonniers sont dans un sale état, en short et pieds nus, leur chemise qui s’en va par morceaux pour fabriquer des mouchoirs et serviettes. Deux mois se passent ainsi sous un soleil brulant....

 

TRANSFERT vers l’ITALIE

Le 15/08/1942, des camions commencent à venir chercher les prisonniers dans la soirée pour les conduire au port de Bengazi en vue d’un transfert vers des prisons italiennes.

Le 16/08/1942, les prisonniers vont devoir embarquer à bord de deux cargos italiens, le « Nino-Bixio » et le « Sestriere », qui vont les amener en Italie. Parmi les 7000 prisonniers (ce chiffre varie selon les sources) embarqués sur le cargo « Nino-Bixio », on retrouve 410 Français, y compris le groupe des 12 parachutistes, entassés dans les cales supérieures de l’arrière du navire. Dans les cales inférieures sont entassés des Hindous, et dans les cales à l’avant des Sud-Africains.

 

LE NAUFRAGE

Le 17/08/1942, le cargo « Nino-Bixio » est en train d’effectuer la traversée de la Méditerranée. Il fait partie d’un convoi léger composé des 2 cargos, accompagnés de deux destroyers et deux torpilleurs pour leurs protections. Le voici maintenant à hauteur du Péloponnèse au large de Pylos.

Il est 16h33, lorsque les passagers ressentent soudain une violente secousse suivie d’une assourdissante explosion. Le bateau vient d’être touché par une torpille lancé par un sous-marin. Le navire se met à giter rapidement par tribord lorsqu’un paquet de mer s’engouffre dans les cales et provoque la relève du bateau. Une seconde torpille explose dans la salle des machines. Les prisonniers paniqués se ruent sur les échelles pour sortir des cales. Jean-Paul, très calme, ramène Pierre à l’apaisement. Après la cohue, les voila sur le pont, Jean-Paul veut sauter à la mer pour s’éloigner le plus vite possible du navire pour ne pas être happé par les remous occasionnés au moment où le bateau sera englouti par les eaux. Mais Pierre ne sait pas nager et veut d’abord trouver une bouée de sauvetage avant de sauter. C’est à partir de ce moment que les deux camarades se perdent de vue. Après quelques minutes, Pierre se rend compte que le navire s’est stabilisé et finalement semble ne pas vouloir couler. Il fait le choix de rester à bord et se met à la recherche de son ami. En vain, Jean-Paul a du très certainement sauter à la mer comme plusieurs centaines l’on déjà fait. Pierre garde cependant espoir qu’il ait pu rejoindre à la nage la côte grecque que l’on aperçoit au loin, mais se met à en douter en raison des 22 kms qu’il faudrait parcourir.

Plus tard, vers 19h un navire torpilleur qui accompagnait le convoi, le « Saetta », prend le « Nino-Bixio » en remorque le cargo pour le conduire au port grec de Navarin près de Pylos. Le capitaine du « Saetta » refuse de recueillir les centaines de naufragés encore à la mer estimant le risque trop important de devenir une cible pour un sous-marin anglais pouvant encore sillonner dans les parages.

Le 18/08/1942, vers 8h00 du matin, le "Nino Bixio" s’échoue sur une plage dans la baie de Navarin.

Les prisonniers survivants sont tous rassemblés sur le pont, et comptés.

On retrouve, dans la cale avant du navire, les corps de 336 victimes, 2/3 sont des Sud-Africains et 1/3 (118) sont des Néo-Zélandais, tués lors de l’explosion de la première torpille. (Ils seront inhumés dans le cimetière de Pilos). Sur le pont du "Nino Bixio", au terme de l’appel des prisonniers, on dénombre plusieurs centaines de prisonniers manquants (selon les sources entre 1500 à 3000 manquants).

Concernant les français il en manque 143, dont 12 polynésiens du Bataillon du Pacifique qui avaient participé à la Bataille de Bir-Hakeim, et 7 parachutistes de la 1e Compagnie d’Infanterie de l’Air dont voici la liste : Jean-Paul TOURNERET, Georges ROYER, son frère Jean ROYER, Emile LOGEAIS, Henri JAMES, Aimé GILLET, et Isidore JOUANNY.

Jean-Paul TOURNERET sera déclaré « disparu en mer ». Il venait d’été promu à compter du 1er aout au grade de Caporal-chef. Il sera déclaré officiellement présumé mort en date du 17 aout 1942.

Son corps ne sera jamais retrouvé.

 

Citation de Jean-Paul TOURNERET

CITÉ à l’ordre de l’Armée Aérienne (JO du 24/2/46) Jean-Paul TOURNERET, Caporal-chef du 2e RCP, pour le motif suivant : « Jeune gradé énergique et plein d’allant, susceptible de faire un excellent chef de section et désigné pour ce fait pour suivre un cours d’aspirant. Engagé aux Forces Françaises Libres dès l’origine, et incorporé à la 1e Compagnie de Parachutistes, a effectué en juin 1942 un raid sur l’aérodrome allemand de Maturba en Cyrénaïque en tant que chef de groupe, remplissant ainsi des fonctions normalement confiées à un officier et s’acquittant de sa mission dans des conditions très difficiles. Placé dans une situation sans issu, a été fait prisonnier le 13 juin 1942. A disparu en mer le 17 aout 1942 lors du torpillage du transport italien « Nino Bixio ».

Attribution de la Croix de guerre 39-45 avec palme de bronze.

 

Frédéric BENTLEY

Stèle des 123 membres des FAFL disparus sans sépulture inaugurée le 25 juin 2022 au Tréport. 

Croix plantée dans un carré de sable près de la stèle aux 123 aviateurs du Tréport 

RESSOURCES

 

Matricule 53596

 

Dossier Résistant au SHD de Vincennes : GR 16 P 575340

 

Notice biographique du site Francelibre.net